Habitée par un imaginaire urbain, la pratique picturale de Martin Boissard se situe au croisement de l’hyperréalisme et de l’abstraction. Des murs, des palissades ou des affiches publicitaires révèlent des trous, des creux, des accidents, des strates, comme autant de perspectives à la fois suggérées et obstruées. En revisitant l’histoire de la peinture figurative, il s’agit pour lui de réactualiser les enjeux du formalisme pictural – ceux de la planéité et de son double, la profondeur.
Florent Lahache
Présentation de la démarche artistique :
Imprégné par la culture du skateboard, qu’il pratique depuis plus de 15 ans, Martin Boissard a une vision alternative de l’environnement et du mobilier urbain, envisagé comme un potentiel terrain de jeu. La déambulation, la recherche de nouveaux « spots » le pousse inlassablement à découvrir de nouveaux espaces, souvent en dehors des sentiers battus et c’est de là qu’est véritablement né son travail artistique.
La première étape de sa pratique picturale consiste donc en l’exploration de l’espace urbain. Parfois synonymes d’errance ou de trouvailles, ces pérégrinations le conduisent à réaliser de nombreuses prises de vue. Murs vandalisés, parois décrépites, palissades de chantier, affiches lacérées, tôles froissées, où toute autre surface plane qui feront écho à la planéité de la toile du peintre. Ce travail obsessionnel, l’amène à un véritable recensement photographique de ce qu’il appelle les « accidents picturaux » qui jalonnent les rues qu’il a arpentées.
Ces différents sujets lui permettent d’aborder la peinture dans sa diversité en s’appuyant sur des courants artistiques et picturaux aussi divers que variés. Ainsi, un mur présentant un graffiti effacé par une couche de peinture différente de sa couleur originelle, créant alors une forme abstraite nébuleuse, pourra être vu comme une référence au travail de Mark Rothko. Un tag effacé au karcher laissera des traces visibles sur la paroi et sera condamné à errer tel un fantôme de ce qu’il était auparavant, à la manière d’un Erased de Kooning Drawing par Robert Rauschenberg.
Bien que figuratif, son travail pictural est néanmoins imprégné par l’abstraction, qu’elle soit expressionniste ou géométrique. Il joue sur l’opposition entre ces courants picturaux diamétralement opposés. Cette dichotomie étant une véritable caisse de résonance dans son travail.
Sa démarche revendique et interroge également la bidimensionnalité de la toile. En accentuant la frontalité, en réduisant volontairement la perspective à son minimum, son travail n’a pas pour but de donner l’illusion d’un espace tridimensionnel, mais bien plus de jouer avec la planéité et son opposé, la profondeur.